La Confirmation
1. Fondements bibliques et historiques
Les prophéties sur le Messie avaient annoncé que « sur Lui reposera l’Esprit du Seigneur » ( Is 11, 2), et ceci serait uni à son choix comme envoyé : « Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu que j’agrée ; j’ai mis mon esprit sur lui ; il apportera le droit aux nations » ( Is 42, 1). Le texte prophétique est encore plus explicite lorsqu’il est placé dans la bouche du Messie : « L’esprit du Seigneur Dieu est sur moi, car Dieu m’a donné l’onction ; il m’a envoyé porter la nouvelle aux pauvres » ( Is 61, 1).
Quelque chose de semblable est annoncé également à tout le peuple de Dieu ; Dieu dit à ses membres : « Je mettrai mon esprit en vous et je ferai que vous marchiez selon mes lois et que vous observiez et pratiquiez mes coutumes. » ( Ez 36, 27) ; et dans Joël 3, 2, l’universalité de cette diffusion est accentuée : « même sur les esclaves, hommes et femmes, en ces jours-là je répandrai mon Esprit ».
La prophétie messianique se réalise avec l’Incarnation (cf. Lc 1, 35), confirmée, complétée et publiquement manifestée dans l’onction du Jourdan (cf. Lc 3, 21-22), lorsque l’Esprit descend sur le Christ sous la forme d’une colombe et que la voix du Père actualise la prophétie de l’élection. Le Seigneur Lui-même se présente au début de son ministère comme l’Oint de Dieu en qui s’accomplissent les prophéties (cf. Lc 4, 18-19), et qui se laisse guider par l’Esprit (cf. Lc 4, 1 ; 4, 14 ; 10, 21) jusqu’au moment même de sa mort (cf . Hb 9, 14).
Avant d’offrir sa vie pour nous, Jésus promet l’envoi de l’Esprit (cf. Jn 14, 16 ; 15, 26 ; 16, 13), comme cela arrive effectivement le jour de la Pentecôte (cf. Ac 2, 1-4), en référence explicite à la prophétie de Joël (cf. Ac 2, 17-18), pour marquer ainsi le début de la mission universelle de l’Eglise.
L’Esprit versé à Jérusalem sur les apôtres est communiqué par eux aux baptisés à travers l’imposition des mains et la prière (cf. Ac 8, 14-17 ; 19, 6) ; cette pratique est tellement connue dans l’Eglise primitive qu’elle est attestée dans l’Epître aux Hébreux comme partie de l’« enseignement élémentaire » et des « thèmes fondamentaux » ( He 6, 1-2). Ce cadre biblique est complété par la tradition paulinienne et johannique qui met en rapport les concepts d’ «onction » et de « sceau » avec l’Esprit versé sur les chrétiens (cf. 2 Co 1, 21-22 ; Eph 1, 13 ; 1 Jn 2, 20.27). Ce dernier fait a trouvé une expression liturgique, attestée dès les plus anciens documents, dans l’onction du candidat avec de l’huile parfumée.
Ces mêmes documents attestent l’unité rituelle primitive des trois sacrements d’initiation, conférés durant la célébration pascale présidée par l’évêque dans la cathédrale. Lorsque le christianisme se diffusa en dehors des villes et que le baptême des enfants devint massif, il ne fut plus possible de poursuivre la pratique primitive. Alors qu’en occident la confirmation resta réservée à l’évêque, séparée du baptême, en orient on conserva l’unité des sacrements d’initiation, conférés à la suite par le prêtre au nouveau né. En orient l’onction avec le saint-chrême prit de plus en plus d’importance. Elle s’étend à différentes parties du corps ; en occident l’imposition des mains devient une imposition générale sur tous les confirmés, tandis que chacun reçoit l’onction sur le front.
2. Signification liturgique et effets sacramentaux
Le saint-chrême composé d’huile d’olive et de baume est consacré par l’évêque ou le patriarche, et seulement par lui, durant la messe chrismale. L’onction du confirmand avec le saint chrême est un signe de sa consécration. « Par la Confirmation, les chrétiens c’est-à-dire ceux qui sont oints, participent plus pleinement à la mission de Jésus-Christ et à la plénitude de l’Esprit Saint que celui-ci possède, afin que toute sa vie exhale « la bonne odeur du Christ » (cf. 2 Co 2, 15). Au moyen de cette onction le confirmand reçoit « la marque », le sceau de l’Esprit Saint » ( Catéchisme , 1294-1295).
Cette onction est précédée liturgiquement, -quand elle a lieu indépendamment du baptême-, du renouvellement des promesses du baptême et de la profession de foi des confirmands. « Ainsi il apparaît clairement que la Confirmation se situe dans la suite du Baptême » ( Catéchisme , 1298). Elle est suivie, dans la liturgie romaine, de l’extensio manuum de l’évêque sur tous les confirmands tandis qu’il prononce une prière qui est une épiclèse de contenu élevé (c’est-à-dire une invocation et une supplique). On arrive ensuite au rite spécifiquement sacramentel, qui se réalise « par l’onction du saint chrême sur le front, faite en imposant la main, et par ces paroles : « NN Sois marqué de l’Esprit saint, le don de Dieu » ( Catéchisme , 1300). Le rite se conclut par le baiser de paix, comme manifestation de communion ecclésiale avec l’évêque (cf. Catéchisme , 1301).
Ainsi donc la confirmation possède une unité intrinsèque avec le baptême, même si elle ne s’exprime pas nécessairement dans le même rite. Avec elle le patrimoine baptismal du candidat est complété avec les dons surnaturels caractéristiques de la maturité chrétienne. La Confirmation est conférée une seule fois, puisqu’elle « imprime dans l’âme une marque spirituelle indélébile, le « caractère », qui est le signe de ce que Jésus-Christ a marqué un chrétien du sceau de son Esprit en le revêtant de la force d’en haut pour qu’il soit son témoin » ( Catéchisme , 1304). Par elle les chrétiens reçoivent avec une abondance particulière les dons de l’Esprit Saint ; ils sont plus étroitement unis à l’Eglise, « et ils s’obligent ainsi plus strictement tout à la fois à répandre et à défendre la foi par la parole et par l’action » [2] .
3. Ministre et sujet
En qualité de successeurs des apôtres seuls les évêques sont « les ministres originaires de la confirmation » . Dans le rite latin le ministre ordinaire est exclusivement l’évêque ; un prêtre peut confirmer validement uniquement dans les cas prévus par la législation générale (baptême d’adultes, baptisé accueilli dans la communion catholique, danger de mort), ou lorsqu’il reçoit un pouvoir spécifique, ou lorsqu’il est associé momentanément à ces effets par l’évêque.
Dans les Eglises orientales, le prêtre est aussi le ministre ordinaire, et il doit toujours utiliser le saint-chrême consacré par le patriarche ou l’évêque.
En tant que sacrement d’initiation la confirmation est destinée à tous les chrétiens, non seulement à quelques-uns choisis. Dans le rite latin il faut que le candidat ait l’âge de raison : l’âge concret dépend des usages locaux, qui doivent respecter son caractère d’initiation. Une formation préalable est requise, une véritable intention et l’état de grâce.
Philippe Goyret
Professeur à l’Université Pontificale de la Sainte Croix
Bibliographie de base
Catéchisme de l’Eglise Catholique, 1212-1321.
Compendium du Catéchisme de l’Eglise Catholique, 251-270.
[1] Cf. Saint Thomas, In IV Sent ., d.3, q. 1, a.5, sol.2.[2] Lumen Gentium , 11.